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De l’Atlas au GR 20 : la césure solidaire et sportive de Manon Bertschy

Un mois et demi de route en stop, un projet bénévole au Maroc, l’ascension du Mont Toubkal, et la traversée du GR 20… Manon BERTSCHY, étudiante du Programme Grande École à l’IÉSEG, nous raconte sa césure marquée par le défi sportif, l’engagement, la découverte culturelle et la beauté des rencontres.

Pourquoi as-tu choisi ce projet de césure combinant à la fois l’aspect solidaire et le défi sportif ?

Depuis toute petite, je suis scoute et j’ai l’habitude de monter des projets en communauté. De plus, l’écologie et la solidarité sont des valeurs qui me tiennent à cœur. J’ai donc décidé, avec mon ami d’enfance, Selim, que j’ai aussi rencontré chez les scouts, de monter un projet ayant un vrai impact environnemental et solidaire. Comme nous aimons tous les deux le sport, nous avons intégré cette dimension.

Un des premiers critères de sélection de notre terrain d’action était bien sûr de pouvoir y aller sans avion, afin de limiter notre empreinte carbone. Ensuite, nous voulions rencontrer un maximum de personnes pour en faire une vraie aventure humaine, ce qui nous a donné l’idée de faire du stop. Et enfin, il y avait cette dimension solidaire et sportive à prendre en compte.

Nous avons donc cherché un projet ayant un sens et un impact positif en fonction de ces critères, et nous avons trouvé un projet au Maroc avec l’association Tawaya.

Vous avez donc entamé votre périple jusqu’au Maroc en stop ?

Oui, nous avons passé un mois et demi sur les routes, en stop, pour rejoindre le Maroc. C’était un vrai saut dans l’inconnu pour nous ! En France, cela a très bien fonctionné : en moyenne, nous attendions entre 5 et 15 minutes pour être pris en voiture. Je n’imaginais pas que cela serait aussi facile ! Les gens étaient curieux, bienveillants et nous avons fait de très belles rencontres.

En Espagne, la différence culturelle a commencé à compliquer un peu les choses, et le stop était moins rapide. Mais malgré tout, nous sommes tombés sur des personnes adorables et prêtes à nous aider, parfois en faisant de grands détours pour nous déposer à destination ! Sur le chemin, certains s’arrêtaient pour nous faire goûter une spécialité locale, et tout le trajet, ils nous expliquaient les environs, le paysage, la culture locale…

Chaque jour, on montait dans deux à huit voitures en général. C’était un rythme soutenu qui a nous a permis de faire des rencontres incroyables, mais c’était épuisant aussi !

Nous n’avions pas d’attentes particulières avant notre départ et nous avons connu plein de bonnes surprises. Bien sûr, il y a eu des moments plus difficiles : ne pas avoir de logement le soir en arrivant sur place était assez stressant. Mais on trouvait toujours des solutions. Je me souviens de notre arrivée à Bilbao où nous n’avions pas de logement… j’ai posté une publication sur Instagram pour faire appel à mon réseau, et une heure plus tard, quelqu’un nous avait trouvé un appartement !

Après un mois et demi sur les routes, vous arrivez enfin au Maroc pour un participer à un projet bénévole…

Nous avons rejoint l’association Tawaya dans un village berbère situé dans l’Atlas, à 4h de route de Marrakech, où nous avons passé trois semaines. L’association œuvre pour soutenir le développement local et l’amélioration des conditions de vie de la population, notamment par le biais d’activités liées à l’éducation des enfants.

Notre rôle principal a été d’assurer du soutien scolaire pour des élèves de primaire. Nous intervenions en complément des professeurs, pour aider les enfants à consolider les bases déjà vues en classe. Nous avons créé des liens très forts avec eux. Nous avons aussi participé à des petits chantiers de construction et d’aménagement dans le village, pour améliorer les infrastructures locales.

Qu’est-ce qui t’a particulièrement marquée ?

Ce qui m’a particulièrement marquée, c’est la place des femmes dans la société locale : elles sont moins visibles dans l’espace public, car elles travaillent beaucoup dans les champs et à la maison. Nous avons appris que ce sont elles les leaders de la famille. Elles sont très respectées, écoutées, et ce sont elles seules qui prennent les grandes décisions au sein du foyer. D’ailleurs, quand on a demandé aux jeunes garçons à l’école ce qu’ils voulaient faire plus tard, beaucoup nous répondaient qu’ils ne savaient pas et tous précisaient « c’est ma maman qui décidera » !

Après cette expérience de bénévolat au Maroc, vous avez rejoint la Corse pour faire le GR 20 ?

Cette expérience a été une immersion culturelle incroyable qui m’a permis de comprendre l’ensemble des éléments constituants cette culture. C’était très intéressant. Nous avons partagé le quotidien du village, découvert les habitudes locales, et surtout, échangé énormément avec les habitants. Même si la barrière de la langue existait parfois, il y avait toujours une curiosité réciproque et une grande bienveillance.

Nous sommes remontés vers le sud de la France en bus et train. Pendant notre trajet au Maroc, nous avons ajouté l’ascension du Mont Toubkal (4 167 m) dans l’Atlas, qui a été une expérience difficile mais hors du commun.

Puis, nous nous sommes rendus en Corse en faisant appel à une coopérative, Sailcoop, qui propose une alternative responsable aux ferries et avions. La traversée en voilier a duré 15 heures.

Enfin, nous avons entamé le GR20, un parcours très exigeant physiquement et mentalement. Mais nous sommes allés au bout, nous nous sommes dépassés, et avons fait de belles rencontres avec des personnes de tous âges. Nous avons pu constater une grande solidarité entre randonneurs.

Vous avez fait appel à des sponsors pour financer en partie ce projet ?

Avant le départ, on avait trouvé deux sponsors : Pileje, pour des compléments naturels, et French Light Outdoor, un artisan qui fabrique du matériel outdoor. Ils nous ont fourni du matériel et un soutien financier.

Les cours à l’IÉSEG ont été utiles notamment pour l’aspect négociation et marketing. Cela m’a donné le bagage nécessaire pour monter notre projet et être à l’aise à l’oral pour le vendre aux futurs sponsors.

Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté ?

Tellement de choses ! Je dirais que ça m’a donné confiance en l’inconnu. Avant, j’étais très organisée, je planifiais tout… Aujourd’hui, je laisse plus de place à l’imprévu en faisant confiance à la vie. J’ai appris à me ressourcer et, aussi, à poser des limites.

Un petit mot pour la fin ?

Tout est possible ! Si vous avez une idée, il faut se mettre en action, se donner une date, et le reste suivra. Je pense que c’est très important de se donner les moyens d’oser réaliser ses rêves.  Mais attention, concernant les projets solidaires, il faut bien se renseigner avant sur l’association, contacter des personnes qui sont déjà partis avec, afin de ne pas faire de mauvais choix !

De manière générale, je trouve que l’engagement associatif est très important. On n’a pas besoin d’aller à l’autre bout du monde pour aider, même localement il y a plein d’associations géniales pour aider.