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Le métier de Responsable Veille Stratégique, expliqué par François CARON, diplômé de l’IÉSEG

Diplômé de l’IÉSEG en 2002, François CARON est aujourd’hui Responsable Veille Stratégique pour le groupe Société Générale. Il nous explique ce métier aussi exigeant que passionnant, à la croisée des chemins entre innovation et stratégie. 

En quoi consiste concrètement votre métier ? 

Je suis Responsable Veille Stratégique au sein du groupe Société Générale, dans l’ancien département Innovation aujourd’hui rattaché à la direction des opérations. Mon périmètre couvre un très large spectre : pas moins de 27 métiers sur une soixantaine de pays, de l’activité bancaire B2C/B2B traditionnelle jusqu’aux offres Corporate pour les grandes entreprises, en passant par les activités de marchés et des secteurs plus spécifiques comme crédits spécialisés, mobilité, assurance, banque transactionnelle, security services… 

Je suis également les sujets transverses comme les technologies émergentes (informatique quantique, intelligence artificielle, IA générative, « open banking »), ou encore les enjeux de RSE et de Future of Work. Mon objectif est d’alimenter la réflexion stratégique de la Direction Générale, du Comité Exécutif, du Comité de Direction et des comités digitaux. 

Je dois fournir à la fois une vision très large et des analyses très ciblées sur les grandes tendances, les acteurs innovants du secteur (BigTechs, pairs bancaires mondiaux et fintechs) ou les mutations de la chaîne de valeur. Cela passe par des notes stratégiques, des panoramas de marché, des présentations. Enfin, j’anime une communauté de veille continue, au sein de l’équipe et auprès des métiers. 

Je représente le groupe Société Générale lors d’événements de place, comme VivaTech, la Paris Fintech Week ou le Web Summit, et auprès de partenaires comme des incubateurs, des cabinets de stratégie, des think tanks ou des médias spécialisés. 

Quelles compétences et qualités requiert le poste de Responsable Veille Stratégique ? 

Je dirais que la qualité principale requise dans ce métier, c’est la curiosité intellectuelle : aimer apprendre, explorer des secteurs et métiers variés et garder un œil critique. Au quotidien, et même en week-end, en vacances ou en famille, je garde un œil sur l’actualité, les signaux « faibles », les tendances émergentes. Il faut rester à l’avant-garde de ce qu’il se passe dans le monde pour pouvoir innover et, ainsi, rester compétitif. 

D’excellentes capacités rédactionnelles sont également indispensables : savoir écrire clairement et synthétiser des sujets complexes en deux pages percutantes pour les remettre au Comex est crucial. Et sans IA, s’il vous plaît !

Il faut aussi faire preuve d’un certain discernement : faire le tri entre le simple buzz surmédiatisé et les vraies tendances de fond parfois sous les radars. Le métavers, par exemple, a été un sujet très médiatisé sans réel impact durable. Aujourd’hui, l’IA est en pleine effervescence – à juste titre, car l’adoption est réelle – mais il faut prendre de la hauteur et parfois relativiser… toutes les promesses de retour sur investissement ne se concrétiseront pas.

Enfin, il faut une vision transversale de la banque : connaître les différents métiers et comprendre les interactions entre eux. Ce n’est pas un poste junior : il faut avoir une connaissance approfondie de l’écosystème et bien connaître les forces et faiblesses internes de l’entreprise. La Société Générale, c’est une structure mondiale de près de 120 000 salariés. Comprendre les différents métiers prend du temps, mais c’est essentiel pour exercer le travail que je fais. 

Quel a été votre parcours pour arriver à ce poste ? 

Après avoir fait mes études à l’IÉSEG, et avant d’arriver à la Société Générale, j’ai travaillé dans plusieurs banques, françaises et internationales, ce qui m’a permis d’avoir une vision très transversale du secteur. J’ai touché à beaucoup de métiers : la banque de détail, l’assurance, la banque transactionnelle, le corporate banking, toujours en gestion de projet ou dans le développement de nouvelles offres. 

Aujourd’hui, j’ai un important réseau, aussi bien en externe qu’en interne, ce qui est extrêmement utile pour mon métier. En parallèle, j’interviens également régulièrement au sein des cours d’innovation financière et d’entrepreneuriat à l’IÉSEG. Lors de ces interventions, j’insiste beaucoup sur le fait qu’on peut innover sans forcément monter sa start-up : l’intrapreneuriat est une vraie voie, notamment via l’incubation et le Corporate Venture Capital. À la Société Générale, nous sommes plusieurs milliers à travailler sur les sujets liés à l’innovation (digital, IA, nouvelles offres).

Quel est le principal défi de votre métier ? 

Je dirais que c’est la mutation du paysage concurrentiel. Avant, un banquier faisait de la veille en regardant le top 5 des grandes banques françaises. Aujourd’hui, c’est terminé : on fait face à une pluralité d’acteurs – des fintechs, des scale-ups, des géants du numérique comme Amazon ou Google… Sur certains segments, notre principal challenger n’est pas nécessairement BNP, mais Apple, Amazon, ou encore Google. Il y a une recomposition de la chaîne de valeur, accompagnée d’une porosité entre les secteurs, notamment dans la mobilité entre constructeurs et acteurs financiers, ou plus généralement entre producteurs d’offres et distributeurs, avec l’essor du e-commerce et de l’économie de plateformes. Il faut donc penser « out of the box » et s’inspirer d’autres secteurs d’activité, pas uniquement du sien : retail, télécoms, santé…

Quels conseils donner aux étudiants qui souhaitent suivre votre voie ? 

Touchez à un maximum de métiers, cultivez votre curiosité, et ne courrez pas trop vite après le prochain poste… Faites bien votre travail actuel, et les opportunités viendront. Surtout, développez votre plume, ayez un style, travaillez également sur votre marque personnelle et votre réseau, dès le début.

Quel rôle l’IÉSEG a-t-elle joué dans votre parcours ? 

J’aime bien dire que l’IÉSEG m’a appris à être une grande « pâte à modeler » : j’ai appris à m’adapter aux différents environnements et à toutes les situations. Je suis diplômé depuis longtemps, et n’ai pas tout retenu des cours évidemment, mais j’ai gardé des réflexes essentiels tels que la méthode, l’adaptabilité et le sens critique. J’ai toujours pu rebondir dans différents environnements car j’avais les clés et les mécanismes acquis à l’école.